Nouveau Journal et vieilles lunes.
François Cavallier, Callian
droit de réponse à l'article de D.Colombo (NJ10)

François Cavallier répond en ces termes à un article de Daniel Colombo (lien). publié dans le nouveau journal N°10 printemps 2011 (lien).. Je pense que le débat sur la plaine, son développement anarchique, la disparition des terres agricoles méritent qu'on s'y intéresse... C'est pourquoi je publie ci-après la réponse de FC.

Se pourrait-il qu'après des débuts alternatifs mais pluralistes, agréablement ironiques et distanciés, le Nouveau Journal se laisse progressivement gagner par un noyautage idéologique qui renâcle à dire son nom, même si on a droit en façade éditoriale à des proclamations d'apolitisme, symptôme d'ailleurs traditionnel du même phénomène ? A-t-on prévenu ceux qui adhérent au slogan du Nouveau Journal sur I `«indépendance » et l'absence de « mainmise » de cette reprise en main par le Comité d'Initiative Citoyenne, dont la qualité humaine des militants ne fait pas de doute, mais enfin qui est somme toute d'extrême gauche ?

Au-delà des convictions, l'extrême gauche a sa rhétorique et ses obsessions argumentatives, parfaitement incarnées dans l'interpellation dont je fais l'objet en page 18 du dernier numéro, et à laquelle on me gratifie cette fois d'un droit de réponse. Depuis mes années de khâgne où beaucoup en étaient gagnés, aucun de ces arguments n'a d'ailleurs changé, alors que le monde, lui, a changé considérablement.

Quels sont ces arguments ? Première règle, seuls les communistes ont une position « éthique », toute autre position ne pouvant être que « clanique » ou pathologique, ce qui prêterait à sourire si cette idéologie une fois appliquée n'avait jamais donné, hier comme aujourd'hui, naissance à quoi que ce soit d'autre qu'à des oligarchies inégalitaires et sanguinaires (ce n'est certes en rien la faute de mon contradicteur). A croire que je fais semblant, sans doute par opportunisme, de me « couler » dans le moule libéral : il faut pourtant, Daniel, me pardonner ce que vous avez l'air de me reprocher comme une trahison insupportable : être un prof agrégé et ne pas être communiste pour autant. Dois-je expier ?

C'est que je ne partage pas du tout la vision économique qu'on m'oppose. Non, la richesse totale d'un pays n'est pas un tout constant, (faute de quoi on se demande comment on a pu sortir de l'âge de pierre), ni non plus un tout d'emblée et définitivement public (comme si toute propriété privée volait d'avance la collectivité). Je ne crois pas non plus que la justice consiste à donner autant à chacun, ni non plus que notre pays, où 45 % du PNB est redistribué, soit un pays si injuste. Je crois que le travail et le mérite sont les seuls critères justes de répartition, et que seule la croissance crée de l'emploi, donc de la dignité et des richesses. Certaines inégalités peuvent me paraître acceptables si les progrès de l'économie profitent aussi (et si possible en premier lieu) aux plus défavorisés.

Je ne suis pas un suppôt de la mondialisation, que je n'invoque pas comme une valeur. Je me résigne avec réalisme, pour lui donner les moyens d'épanouir ses services publics, à pourvoir avec autonomie aux besoins de ma commune, dont les anciens bailleurs de fond en pleine crise ne retrouveront jamais leurs marges de manoeuvre d'hier. Prétexte de la diatribe, la zone Agora Sud n'est pas une fuite en avant fomentée par un vilain libéral, mais l'évolution d'une zone dessinée en 2001 (qui s'en est ému en ce _ temps-là ?) suivant la requête de l'Etat pour préparer le transfert de Danisco (aujourd'hui Firmenich) qui s'est finalement fait vers Grasse au détriment du canton. J'en revendique l'identité architecturale sobre et les très nombreux emplois de proximité qu'elle crée. Oui, j'aime mieux que ceux qui mangent au McDo puissent le faire ici plutôt qu'ailleurs...

Non, je ne crois pas qu'on puisse dire de bonne foi que les nems, le pad thaï, les crêpes, les sushis, les pizzas, le chili con carne et le kebab relèvent de la « biodiversité locale » comme le dit mon contradicteur et pas le hamburger, sauf à avoir des orientations idéologiques datant de la guerre froide. Si le dirigisme se mêle même de ce qu'on mange...
Tout est pourtant si simple : il suffit que ceux qui ne veulent pas aller manger à ce restaurant n'y aillent pas. Evidemment, ceux qui y vont sont très (très) nombreux, mais ce n'est bien sûr là qu'une preuve de plus de ma démagogie. Les démocrates ne peuvent que se réjouir de ce qui fait plaisir au plus grand nombre...

À propos de MacDo, du développement de la plaine et de la disparition des surfaces agricoles dans la plaine de Fayence, j'ai envie de demander à FC de lire cet extrait du livre de Bruno Parmentier "Nourrir l'humanité" (lien).

Et pour sa diatribe à l'égard de Daniel Colombo, du CIC, du "Grand-Soir" de son séjour en Khagne autrefois avec des jeunes qui rêvaient à leur âge, de changer le monde... cet extrait du livre du philosophe Jürgen Habermas "l'avenir de la nature humaine" Gallimard 2002 (lien).

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Mis à jour le 15/06/2011