MALPASSET: Naissance, Vie, Mort d'un barrage

extrait et reformaté sans modification
du site http://perso.wanadoo.fr/minus0202/MALPASSET.htm

Quelques jours après le 2 décembre 1959, les Conseillers Généraux du Var, les élus de cette région meurtrie s'écriaient :

Non, nous ne sommes ni des accusateurs, ni des juges. Nous n'avons pas non plus à être des avocats. Nous n'accusons personne. Mais nous sommes des hommes bouleversés par l'ampleur de la catastrophe imprévisible qui a semé la mort, alors que nous avions voulu, nous, faire une oeuvre de vie.

Dix neuf ans se sont écoulés... NDLR 2009 50 ans le 2 décembre 2009

Fréjusien, témoin traumatisé, comme tous mes concitoyens, je pense que le moment est venu d'essayer de définir les causes da la rupture.

Les grands événements historiques ne peuvent se juger qu'avec le recul indispensable.

Après avoir longuement étudié: archives officielles, études scientifiques, rapports, traitant de la question, j'ai pensé être en mesure d'écrire cette plaquette sur les causes probables de l'éclatement de la digue de Malpasset. Je souhaite avoir traduit exactement la pensé de ceux qui se sont penchés sur ce problème capital.

Je dédie mon modeste travai1 au souvenir de mes nombreux amis victimes innocentes de la tragédie du siècle.

BILAN D'UNE CATASTROPHE

POURQUOI ET COMMENT AVAIT-ON DECIDE LA CONSTRUCTION DU BARAGE

A la fin de la guerre 1939-45, le Var meurtri par la guerre et par les occupations Allemandes et Italiennes, devait à la fois reconstruire et s'équiper pour son avenir.

Au premier rang des soucis du Conseil général du département du Var, parmi tous les problèmes qui se présentent, il en est un qui va bénéficier de toutes les priorités : L'EQUlPEMENT HYDRAULIQUE.

Il domine toute la vie Varoise du fait de ses conséquences humaines et économiques.

Discuté depuis plus d'un siècle, il présente un intérêt virtal dans un départemant souffrant dans son ensemble, et notamment en été, du manque d'eau.

Cette pénurie va d'ailleurs en s'accentuant chaque année; en fonction de la poussée démographique et des besoins considérables censécutifs à l'afflux saisonnier des touristes. Il aut aller vite. Tout retard risque d'hypothéquer lourdement voire définitivement notre région. 

Les élus départementaux savent que l'équipement suffisant du Var va déterminer son avenir sur tous les plans : humain , industriel, agricole, touristique.

On n'aurait pas pardonné aux responsables départementaux de ne pas répondre à ces impératits, alors que les municipalités, dont les possibilités locales étaient réduites, cherchaient par tous leurs faibles moyens à mettre en oeuvre, immédiatement une politique courageuse de l'eau.

Dès 1946, le Conseil général, demandait à l'Administration de coordonner toutes les études qui avaient été faites et de lui soumettre un projet d'ensemble susceptible de résoudre définitivement ce problème vital. Les besoins les plus importants, se situaient dans le sud du département notamment sur le littoral entre le Trayas et Ramatuelle. Région en plein developpement tour:istique et, en même temps la plus apte à utiliser l'eau pour l'irrigation, en raison de la fertilité naturelle de son sol, de son climat tempéré et de sa situation géographigue.

Tous ces élements font, on le sait, de cette zone un centre de production de cultures riches : les fruits et les primeurs de ces vallées et en particulier de Fréjus, sont déja de renommée mondiale.

Plusieurs projets d'équipement hydraulique furent élaborés par les techniciens des administrations compétentes. Ils étaient de conception différente et se trouvaient situés à des emplacements et sur des cours d'eau différents de cette région du Littoral.

Le Conseil général en fut saisi et leur examen donna lieu à l'époque à de longues discussions et à de fréquentes contreverses.

Finalement, il apparut qu'un arbitrage était indispensable. L'administration et les Techniciens consultèrent alors les plus hautes instances Ministérielles. Elles étudièrent ces divers projets et ne tardèrent pas à faire connaître leur décision.

Le projet de barrage sur la Siagnole, aftluent de la Siagne élaboré par les Ponts et Chaussées pour l'alimentation des communes de Saint-Raphaël et Fréjus et pour l'irrigation de la plaine, fut rejeté par le Ministère de l'Agriculture. II préféra le projet de barrage établi sur le Reyran, auquel il donna son accord par d écision du 3 Août 1950.

Le Conseil général, informé de cette décision ministérielle, soucieux de réaliser le projet d'équipement hydraulique de l'Est du département, pour lequel le concours financier du Ministère de l'Agriculture était indispensable, approuva le principe de la création du BARRAGE DU REYRAN.

D'autant, que le Ministère de l'Agriculture promettait sur ces travaux une subventlon globale de 60% sur l'ensemble du projet (barrage et travaux d'irrigation agricole). Le Ministère de l'Intérieur, (ministère de tutelle des collectivités locales) laissait de son côté entrevoir la pcssibilité de subventions pour !'aménagement en eau potable des villes du Littoral.

Il faut ajouter que le projet des Ponts et Chaussées n'était accompagné d'aucune promesse de subvention immédiate. Cela revêtait une importance, compte tenu de l'urgence des travaux.

Ceci admis, Administration, techniciens, Assemblée Départementale voulurent normalement s'entourer du maximum de garanties.

LE REYRAN

Joseph AUBENAS, l'un des historiens les plus écouté de Fréjus le définit ainsi (1):

 Le Reyran (2) prend sa source au Nord de Bagnols, à six lieux de Fréjus. C'est une rivière torrentueuse, à sec pendant les trois quarts de l'année (3), mais qui à l'époque des pluies roule avec une impétuosité extréme un grand volume d'eau, entrainant en méme temps, une quantité consrdérable de sable et de cailloux, ramassés dans la gorge de l'Estérel dont il sort.

Le débit du Reyran se révèle fortement capricieux. Depuis des siècles, chaque année, ouvrant de nombreuses brèches dans ses rives, il crée dans la plaine de Fréjus de grâves inondations. Elles portent préjudice à notre agriculture et mettent en danger !a sécurité des habitants de la plaine.

Dompter le Reyran est donc important. La réserve d'eau ainsi créée, outre qu'elle apportera l'eau indispensable aux populations toujours croissantes et à nos terres assoiffées, elle préservera pense-t-on nos forêts de l'Estérel contre l'incendie et de ce fait aidera à la régénération du massif forestier de ce massif . Le Reyran enf in dompté aura son cours définitivement régularisé et la plaine se trouvera à l'abri des crues soudaines dues aux orages intempestifs.

Depuis la catastrophe, le Reyran a été définitivement canalisé dans une immense voie de béton. Le volume du cours nouveau a été, dit-on, calculé sur la crue maximale du siècle.