Communes, intercommunalités, histoire et devenir

INTRODUCTION

Depuis une dizaine d'années, l'émergence du mouvement intercommunal dans notre pays conduit a poser de maniére radicalement nouvelle la question des politiques publiques au niveau local. A côté de nos 36000 communes, fruit d'un long héritage historique, s'ajoutent désormais 2525 communautés urbaines, d'agglomération ou de communes, constituées pour l'essentiel sur la base de transferts de compétences librement consentis de la part de ces communes.

Ce phénomène récent mérite d'être mis en perspective pour être bien compris:
- une perspective historique pour saisir comment l'État a choisi d'organiser le maillage au plus fin de son territoire au fil du temps;

- une perspective spatiale car beaucoup d'autres pays ont choisi la voie de la fusion plus ou moins autoritaire pour diminuer leur nombre de communes.

Comprendre le fait intercommunal en 2005 suppose de connaître les caractéristiques de nos structures intercommunales et la réalité du phénomène tant d'un point de vue quantitatif (nombre d'intercommunalités selon leur régime juridique) que qualitatif (degré d'intégration et compétences transférées).

A partir de cet examen, un certain nombre de problématiques doivent retenir notre attention:

- la mise en place de ces intercommunalités a-t-elle permis de gagner en cohérence et en partenariat dans l'action publique?

- comment se sont mobilisés les différents acteurs, élus locaux en premier lieu, mais également acteurs sotie-économiques?

- comment les citoyens se sont-ils sentis impliqués dans ces transformations qui touchent des domaines essentiels de notre vie quotidienne?

Cette approche doit permettre de mieux comprendre ce qui fonde la viabilité et la vitalité de ce couple singulier commune/intercommunalité, tout à fait original dans notre architecture politique et administrative, afin de pouvoir dégager quelques pistes de réflexion pour l'avenir.

A - DE L'ÉCLATEMENT COMMUNAL A L'ÉMERGENCE DE L'INTERCOMMUNALITÉ EN FRANCE

1. Le choix de la Constituante

L'article X du décret du 4 août 1789 stipule que «tous les privilèges particuliers des provinces, principautés, pays, cantons, villes et communautés d'habitants, soit pécuniaires, soit de toute autre nature, sont abolis sans retour et demeureront confondus dans le droit commun de tous les Français.»

L'abolition des privilèges octroyés aux différentes collectivités impose de mettre en place une autre organisation administrative de la Nation. Si le principe d'égalité entre les communes est établi, la question du nombre de celles-ci fait débat.

Certains proposent la mise en place de 6 500 municipalités, mais Mirabeau, au nom de l'individualisme révolutionnaire, prône la transformation en communes des 44000 paroisses de l'Ancien Régime. C'est lui qui va l'emporter.

Un décret de l'Assemblée nationale du 14 décembre 1789 prévoit que «sont supprimées et abolies les municipalités actuellement subsistantes dans chaque ville, bourg, paroisse ou communauté, sous le titre d'hôtels de ville, mairies, échevinats, consulats, et généralement sous quelque titre et qualification que ce soit».

A la place vont être installées de nouvelles institutions uniformes et communes à toutes les localités; comme le précise dans sa première phrase l'instruction de l'Assemblée nationale sur la formation des nouvelles municipalités dans toute l'étendue du royaume en date du 14 décembre 1789, il y aura une municipalité dans chaque ville, bourg, paroisse ou communauté de campagne» et le paragraphe 2 de l'instruction insiste: «toutes les municipalités du royaume, soit de ville, soit de campagne, étant de même nature et sur la même ligne dans l'ordre de la constitution, porteront le titre commun de municipalité, et le chef de chacune d'elles, celui de maire».

Créer les communes à partir des paroisses existantes présentait l'avantage d'être facilement identifiable pour le citoyen, mais le double inconvénient d'un morcellement du territoire et de la coexistence de municipalités de taille très variable.

Ces inconvénients n'étaient pas méconnus puisque, dans l'instruction de l'Assemblée nationale sur les fonctions des assemblées administratives en date du 20 août 1790, il était prévu au paragraphe 3 de son chapitre 1: «il peut être à la convenance de plusieurs communes de se réunir en une seule municipalité, il est dans l'esprit de l'Assemblée nationale de favoriser ces réunions et les corps administratifs doivent tendre à les provoquer et à les multiplier par tous les moyens qui sont en leur pouvoir. C'est par elles qu'un plus grand nombre de citoyens se trouvera lié sous un même régime, que l'administration municipale prendra un caractère plus imposant, et qu'on obtiendra deux grands avantages toujours essentiels à acquérir, la simplicité et l'économie». La recherche de cette simplicité et de cette économie va être récurrente dans les deux siècles à venir.

Dès 1793, Condorcet signale que le trop grand nombre de communes est un obstacle à l'exercice des droits d'un grand nombre; «ces droits ne pouvant être étendus sans qu'on fût exposé à ne pas trouver des hommes capables de les exercer», il proposait donc de créer des «grandes communes» associant dans un espace de dix kilomètres de rayon des populations rurales, ce qui aurait permis d'établir un certain équilibre entre villes et campagne. Ce projet ne fut pas adopté.

2. La loi de 1884

Les différents régimes qui se succèdent en France vont avoir des gestions différenciées de l'échelon communal, mais qui font de fait de la commune le dernier rouage de l'administration étatique et non le premier échelon d'expression démocratique des citoyens.

La loi de 1884 sur l'organisation municipale va mettre en place un véritable code municipal en regroupant en un seul document les textes relatifs aux communes. Cette loi revêt une importance particulière dans la mesure où, tout en consacrant les acquis antérieurs, elle constitue le véritable point de départ de l'affirmation progressive des communes notamment face au pouvoir central.

Sa caractéristique principale est qu'elle crée un régime juridique uniforme pour toutes les communes de France. Ce choix ne sera jamais remis en cause par la suite. Il n'avait pourtant pas un caractère évident compte tenu de l'extrême disparité des communes françaises et, en particulier, du nombre et _de;la spécificité d'es petites communes.

La structure choisie pour l'organisation communale est la même que celle retenue pour l'échelon départemental: - un organe délibérant, le conseil municipal, qui adopte des délibérations;
- un organe exécutif, le maire, chargé de l'application des décisions du conseil municipal;
- un représentant de l'État, le maire, qui. est donc à la fois représentant de la commune et de. l'État.

L'article premier de la loi dispose: «Le corps municipal de chaque commune se compose du conseil municipal, du maire et d'un ou de plusieurs adjoints».

Les principales dispositions-de la loi de 1884 sont:

- l'élection au suffrage universel du conseil municipal qui est désigné pour une durée de quatre ans et est renouvelable intégralement (en 1929, la durée du mandat municipal est portée à six ans) ;

- l'élection du maire par le conseil. municipal (sauf à Rails), ce qui fait du maire le premier représentant de la commune;

- la tutelle du préfet, à la fois sur le maire et sur les actes de la commune;

- l'attribution d'une clause générale de compétence aux communes, ce qui représente une extension significative des attributions des communes. L'article 61 de la loi de 1884 dispose, dans son premier alinéa: «Le conseil municipal règle, par ses délibérations, les affaires de la commune». Il exprime le principe, aujourd'hui constitutionnel, de la libre administration des collectivités locales.

D'autres dispositions importantes concernent:

- la gratuité des fonctions. L'article 74 de la loi énonce: «tes fonctions de maires, adjoints, conseillers municipaux sont gratuites. Elles. donnent seulement droit au remboursement des frais que nécessite l'exécution des mandats spéciaux. Les conseils municipaux peuvent voter, sur tes ressources ordinaires de ta- commune, des indemnités aux maires pour frais de représentation»;

- la structure et le mode de vote et de règlement du bud- get: «Le budget communal se divise en budget ordinaire et budget extraordinaire» (article 132); «Le budget de chaque commune est proposé par le maire, voté par le conseil municipal et réglé par le préfet» (article 145). La loi détermine en outre une liste précise de dépenses obligatoires pour les communes.

Au total 168 articles fondent le régime communal républicain.

3. Premiers regroupements: des conférences intercommunales aux syndicats intercommunaux

S`il met, en place un régime juridique communal unique en 1884, le législateur prévoit cependant des dispositions concernant les communes pouvant avoir des intérêts communs; les articles 116 et 118 autorisent la réunion de conférences intercommunales, mais l'expérience démontrant l'insuffisance de ces règles, le législateur a, le 22 mars 1890, complété la loi municipale par l'addition d'un titre VIII consacré à l'organisation des syndicats de communes. Il faudra attendre 1955 pour voir apparaître une autre formule intercommunale: le syndicat mixte.

a) Les conférences intercommunales

Deux ou plusieurs conseils municipaux peuvent provoquer entre eux une entente sur les objets d'utilité com- munale compris dans leurs attributions et qui intéressent leurs communes respectives; ils peuvent faire des conventions à l'effet d'entreprendre ou de conserver, à frais communs, des ouvrages ou des institutions d'utilité commune.

Les questions d'intérêt commun seront débattues dans des conférences où chaque conseil, municipal sera représenté par une commission spéciale nommée cet effet et composée de trois membres élus au scrutin secret, les décisions qui y seront prises ne seront exécutoires qu'après avoir été ratifiées par tous les conseils municipaux intéressés et sous réserve des approbations budgétaires.

Les communes se sont donc vues reconnaître la possibilité de réaliser entre elles des ententes passagères, mais en 1890 le législateur leur donne la possibilité de s'associer d'une façon durable pour gérer des institutions intercommunales. Ce seront les syndicats de communes.

b) Les syndicats de communes

La loi du. 22 mars 1890 autorise les communes à se syndiquer, cette nouvelle forme d'activité intercommunale apparaît comme un remède à la faiblesse des petites communes, sous la forme d'association volontaire. Les conseils municipaux reçoivent la liberté de définir la tâche à confier au syndicat parmi les fonctions de l'administration communale.

L'administration du syndicat est confiée à un comité; s'il n'y a pas d'autres dispositions, le comité comprendra deux délégués de chaque commune, élus par les conseils municipaux.

La nature juridique du syndicat est celle de l'établissement public; le respect des règles de spécialité, d'égalité et d'unanimité rend difficile les évolutions de cette structure. Le syndicat ne peut exercer qu'une compétence, chaque commune quelle que soit sa taille a la même représentation et les délibérations nécessitent l'accord des délégués de toutes les communes.

Cette institution nouvelle qui devait permettre aux communes de se regrouper pour répondre à des besoins dépassant leurs capacités financières, techniques ou géographiques va se développer lentement. De 1890 à 1914, seuls trente-sept syndicats seront constitués, il y en aura un peu plus de 2000 en 1939.

c) Le syndicat mixte

En vue d'oeuvres ou de services présentant une utilité pour chacune d'elles», un décret du 20 mai 1955 crée un établissement public nouveau qui permet d'associer aux communes d'autres personnes morales de droit public: collectivités locales et établissements publics comme les chambres de commerce et d'industrie, d'agriculture et des métiers.

d) Les SIVU, SIVOM et districts

Pour pallier les blocages résultant de la règle de l'unanimité, les ordonnances du 5 janvier 1959 vont mettre en place deux nouveaux outils de coopération intercommunale. L'ordonnance du 59-29 va autoriser la création de syndicats intercommunaux à Vocation unique (SIVU) à la majorité qualifiée des communes intéressées, au lieu de l'unanimité. Elle prévoit aussi que des syndicats intercommunaux à vocation multiple (SIVOM) peuvent être constitués sous réserve de délibération concordante de tous les conseils municipaux.

Ces mesures vont faciliter les interventions intercommunales dans des domaines techniques comme l'adduction d'eau, l'assainissement ou la construction et la gestion d'équipements sportifs, scolaires et culturels.

L'ordonnance n° 59-30 «tendant à instituer des districts urbains dans les grandes agglomérations» se veut plus ambitieuse. Il s'agit de mettre en oeuvre une institution capable de structurer les grandes agglomérations composées de nombreuses communes, et de répondre aux multiples problèmes de liaison d'une Ville centre avec ses communes périphériques.

Le district peut être créé soit d'office, soit sur la demande des communes intéressées. C'est un établissement public qui, à côté des compétences qu'il peut se voir confier par les communes membres, exerce de plein droit deux compétences obligatoires: les services du logement et les centres de secours contre l'incendie. Pour son fonctionnement, les règles d'unanimité et d'égalité sont abandonnées.

Malgré une politique d'incitation financière, sous forme le plus souvent de majoration des subventions des opérations d'équipements menées par les districts, il n'y aura en 1970 que 90 districts urbains, dont certains du reste ne regroupent que des communes rurales.

Le législateur, pour mettre la loi en accord avec la réalité, va supprimer le qualificatif d'urbain pour le district par une loi du 31 décembre 1970. Il peut être noté qu'il a été admis qu'en milieu rural, les compétences obligatoires pouvaient ne pas être exercées. L'évolution de la législation dans les secteurs du logement et de la lutte contre l'incendie va du reste montrer l'inadéquation de ces transferts.

4. Les communautés urbaines

Par la loi du 31 décembre 1966, le législateur va mettre en place une forme beaucoup plus intégrée de coopération intercommunale la communauté urbaine. A l'origine elle ne peut être créée que dans des agglomérations de plus de 50000 habitants; le seuil sera ensuite abaissé par la loi du 6 février 1992 à 20000 habitants, puis relevé à 50000 habitants en 1999.

Au niveau des compétences, la communauté urbaine exerce de plein droit des compétences très étendues dans les domaines de l'aménagement de l'espace, du développement économique, du transport urbain, de la voirie, de la réalisation des principaux équipements urbains, et de la gestion des services publics. Elle bénéficie pour ce faire d'un régime de fiscalité propre.

Si le mode de création des communautés urbaines demeure fondé sur le consentement des communes, pour la première fois en 1966, la loi impose la création de quatre communautés urbaines à Bordeaux, Lille, Lyon et Strasbourg.

5. Les syndicats d'agglomération nouvelle

En 1970, le législateur veut freiner l'attirance de Paris et de certaines grandes métropoles (Lille, Lyon, Marseille, Rouen). Pour ce faire, la loi du 10 juillet tend à favoriser la création d'agglomérations nouvelles à quelque distance de ces métropoles.

L'article de la loi précise.. que ces agglomérations nouvelles sont destinées à constituer des centres équilibrés grâce aux possibilités d'emploi et de logement ainsi qu'aux équipements publics et privés qu'y seront offerts. Leur programme de construction doit porter sur 10000 logements au moins».

Les communes intéressées ont le choix pour l'organisation de l'agglomération nouvelle entre trois formules: celle de la communauté urbaine, celle du syndicat communautaire d'aménagement, celle de l'ensemble urbain.

Au total, neuf syndicats d'agglomération nouvelle verront le jour.

6. La loi «Marcelin»

La loi du 16 juillet 1971, dite aloi Marcellin», constitue la dernière tentative de l'État de réduire le nombre de communes françaises en incitant fortement à la fusion de communes. Cette loi prévoit que dans chaque département seront déterminées: les communes qui peuvent assurer par elles-mêmes leur développement; les agglomérations et les communes situées hors des agglomérations dont le développement et la bonne administration appellent une mise en commun des moyens et ressources des communes composantes; les communes qui devraient fusionner avec d'autres communes. Pour ces dernières, le préfet peut prononcer la fusion, si les conseils municipaux intéressés sont d'accord. En cas de désaccord d'un ou plusieurs conseils municipaux, le préfet peut prononcer la fusion sur avis conforme du conseil général. Si le conseil général est lui-même défavorable, le préfet peut recourir au référendum communal.

A côté de cette procédure autoritaire sont prévues des procédures volontaires de fusion. La fusion peut être pure et simple ou s'accompagner de la création de communes associées. Cette création entraîne un certain nombre de conséquences juridiques: la désignation d'un maire délégué qui remplit dans la commune associée les fonctions d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire, le sectionnement électoral, la création d'une annexe de la mairie, la création d'une section du bureau d'aide sociale, la possibilité d'instituer une commission consultative.

Le plan préfectoral à côté des fusions peut proposer d'autres formules de coopération intercommunale â promouvoir. Si les conseils municipaux intéressés rejettent la proposition de création d'une communauté urbaine, le préfet peut procéder à la création d'office d'un district. Pour les propositions de création de syndicats à vocation multiple et de districts, le préfet pourra passer outre à l'opposition des conseils municipaux intéressés, s'il obtient un avis conforme du conseil généraL A défaut, un syndicat dont la compétence est limitée aux études et à la programmation des équipements publics est créé par arrêté préfectoral En contrepartie de ces aspects contraignants et autoritaires, la loi prévoit un certain nombre de mesures fiscales et financières incitatives et avantageuses.

Si, d'après le ministère de l'intérieur, les deux tiers des communes étaient intéressées par l'application de la loi, les résultats furent décevants, les mécanismes de contrainte étant très rarement mis en oeuvre, et les élus locaux ne reprenant pas à leur compte la démarche volontaire. De 1971 à 1977, 838 fusions concernant 2045 communes sont réalisées, mais, dès 1978, le nombre de communes s'accroît pour cause de défusion : 36385 en 1978 pour 36380 en 1977.

7. Les lois «ATR », « Pasqua », «Voynet» «Chevènement»

Les lois de décentralisation de 1982 vont supprimer le contrôle d'opportunité des préfets sur les communes, mais ne touchent pas à la place de la commune dans l'organisation territoriale de la France.

a) La loi du 6 février 1992 (loi ATR)

C'est par la loi du 6 février 1992 sur l'administration territoriale de la République (ATR) que le législateur affirme que «le progrès de la coopération intercommunale se fonde sur la libre volonté des communes d'élaborer des projets communs de développement au sein des périmètres de solidarité».

Il institue dans chaque département une commission départementale de la coopération intercommunale dont le rôle est double: établir et tenir à jour un état de la coopération intercommunale dans le département, et élaborer une charte intercommunale de développement et d'aménagement.

En outre, la loi crée deux catégories supplémentaires d'établissements publics de coopération intercommunale: la communauté de communes et la communauté de ville. La «communauté de communes» regroupe plusieurs communes et a pour objet de les associer au sein d'un espace de solidarité en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace en milieu rural.; cette restriction au milieu rural sera supprimée par La loi n° 93-122 du 29 janvier 1993; la souplesse de mise en oeuvre et de fonctionnement va faciliter l'éclosion de cette structure.

La «communauté de ville» regroupe plusieurs communes d'une agglomération de plus de 20000 habitants et a pour objet d'associer celles-ci au sein d'un périmètre de solidarité urbaine en vue du développement concerté de l'agglomération. Ce type de structuration n'aura que peu de succès: au 1er janvier 1999, seules cinq communautés de ville ont vu le jour.

b) La loi du 4 février 1995 (loi Pasqua)

En 1995, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, dite loi « Pasqua », permet la création des «pays», espaces non institutionnels de rencontre, de dialogue et de projet entre urbains, périurbains et ruraux. Le principe d'action est celui du volontariat et de l'intelligence collective, grâce à l'incitation à contracter. L'État propose aux territoires de s'organiser en pays sur la base d'un projet fédérateur à une échelle cohérente.

c) La loi du 12 juillet 1999 (loi Chevènement)

La loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi «Chevènement», va mettre en place un nouveau cadre institutionnel pour l'intercommunalité ainsi que des modalités permettant d'adapter les structures existantes à ce nouveau cadre.

Ainsi, les communautés de ville, les districts et à terme les syndicats d'agglomération nouvelle (SAN) sont appelés à disparaitre au profit de trois structures que sont la «communauté urbaine», la «communauté de communes» et la «communauté d'agglomération» nouvellement créée.

Ces structures, dotées d'une fiscalité propre, devront être d'un seul tenant et sans enclave. Elles auront des règles de fonctionnement communes en ce qui concerne notamment:

- leur mode de création et de dissolution;

- leurs modalités de transformation en un autre type de structure intercommunale;

- leur organe délibérant;

- leurs compétences;

- les modalités d'information et la transparence.

d) La loi du 25 juin 1999 (loi Voynet)

Pour sa part, et préalablement, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, dite loi «Voynet», avait créé deux nouvelles entités territoriales: le « pays» et l'«agglomération » qui ne sont pas de nouveaux échelons administratifs, ni de nouvelles collectivités territoriales. Ces deux nouvelles entités doivent être porteuses d'un projet définissant les orientations en matière de développement économique et d'aménagement urbain, soit de l'agglomération, soit du pays.

Des contrats de villes peuvent être passés entre l'État ou la région et les communes ou leur groupement dans le cadre d'une politique de requalification urbaine ou de développement solidaire. Ces contrats de villes peuvent être passés dans le cadre d'un pays ou d'une agglomération. Pour les agglomérations, la signature du contrat vaut encouragement à se transformer en établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) avant la fin du contrat.

La loi exige la création au sein de chaque agglomération ou pays d'un conseil de développement, composé d'élus, de représentants du monde économique, syndical et associatif.

8. La loi relative aux libertés et responsabilités locales

A coté du transfert de compétences de l'État vers les régions et les départements, la loi du 13 août 2004 apporte un certain nombre de précisions concernant le périmètre, le fonctionnement et les conditions d'exercice des compétences intercommunales.

La loi impose désormais un délai pour définir l'intérêt communautaire, notion introduite par la loi Chevénement pour répartir l'exercice d'une compétence entre un EPCI à fiscalité propre et ses communes membres.

La loi permet aux maires de transférer certains pouvoirs de police spéciale (circulation, stationnement, assainissement non collectif, traitement des ordures ménagères, accueil des gens du voyage, manifestations culturelles et sportives dans des équipements communautaires) au président de communauté. Toutefois les pouvoirs ainsi transférés seront exercés par arrêté conjoint du président et du maire. Les conditions de constitution de services communs à la commune et à la communauté sont assouplies et fendues plus opérationnelles.

Les EPCI à fiscalité propre ont la faculté de demander au département ou à la région d'exercer au nom de ces derniers tout ou partie de leurs compétences dans des conditions prévues par une convention.

Concernant les périmètres, les SP/OM qui ont les compétences et les conditions physiques et démographiques d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération pourront se transformer en l'une ou l'autre, sans avoir à se dissoudre. Par ailleurs, le préfet peut désormais passer outre le principe de la continuité territoriale si le refus d'adhésion d'une commune a un EPCI à fiscalité propre en empêche une autre d'adhérer.

Enfin, un régime dérogatoire jusqu'au 1er janvier 2005 permet au préfet d'autoriser une commune A se retirer d'une communauté d'agglomération sans l'accord de celle-ci pour rejoindre un autre EPCI à fiscalité propre.

Au terme de cet historique, il est clair qu'après la loi Marcellin, la France a préféré encourager par des incitations financières la collaboration volontaire entre collectivités. Les derniers chiffres de l'intercommunalité - en 2005, 2525 EPCI à fiscalité propre regroupant 88% des communes et 52.3 millions de Français - démontrent Le succès, tout au moins quantitatif, de cette démarche initiée par le bas.

De nombreux pays européens ont pour leur part imposé par la loi des fusions entre leurs communes. Au Canada, le Québec, qui a lui aussi tenté de réduire de façon autoritaire le nombre de ses municipalités, rencontre actuellement de sérieuses difficultés. Avant de détailler les structures intercommunales françaises telles qu'elles résultent aujourd'hui des différentes lois qui viennent d'être évoquées, il a paru opportun d'exposer la situation en Europe et de décrire l'expérience québécoise pour mieux faire apparaitre les dangers de ta contrainte et a contrario fintèret de regroupements librement consentis.