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Fayence: projet de transfert du magasin super U
Pour mieux comprendre ce projet

Ce projet du maire de Fayence à la demande du magasin SuperU de Fayence, s'inscrit dans la structure de la grande distribution. En France, la grande distribution, "constituée des hypermarchés et des entreprises dites du grand commerce spécialisé (hors alimentation, exemples Weldom, Sport 2000, Delco à Callian)" selon la définition de l’INSEE, est un secteur économique de plusieurs centaines de milliers d'emplois, au sein duquel la concurrence économique était en 2007, selon les principaux économistes, fortement limitée par les multiples lois et réglementations - lois Royer, Sapin, Galland, Raffarin, - dont les effets pervers sont la concentration des grandes enseignes au détriment de la concurrence, du pouvoir d'achat des consommateurs et de l’emploi. Diverses études de spécialistes et d'économistes estiment à 10-15% le différentiel de prix en l'absence de concurrence et à 100 000 le nombre d'emplois qui pourraient être pourvus.

Depuis 3 décennies, le développement des grandes surfaces de distribution en France avec self-service a profondément changé les modes de consommation et de distribution pour le bénéfice des consommateurs. Mais avec la multiplication des surfaces, on a assisté à la disparition de nombreux petits commerces locaux et à la "désertification" des centres villes. C'est pourquoi très vite la grande distribution a été l'objet de dispositifs législatifs destinés à l'encadrer pour protéger le petit commerce et préserver l'activité économique au centre des villes. Mais ces lois ont toujours eu des effets pervers car les grands groupes de distribution les ont contournées. Il y eut successivement les lois Royer, Sapin, Galland et Raffarin et aujourd'hui en 2009, la loi LME du 4 août 2008. Voir l'historique du développement des grandes surfaces et du dispositif de leur régulation de 1961 à 2009. Il en résulte aujourd'hui que, contrairement à ce qui était recherché, la grande distribution à dominante alimentaire est formidablement concentrée en un petit nombre de groupes concurrents et en part de marché. Il y avait 9 groupes distributeurs en 2000, il n'y en a plus que 6 en 2007 (Carrefour, Leclerc, Casino, Auchan, Intermarché et système U), et ils assurent près de 80% de la distribution de produits alimentaires. Voir ici les disparus.

La concurrence dans le secteur de la grande distribution à dominante alimentaire est limitée en France par l'obligation d'obtenir une autorisation d'implantation auprès d'une commission départementale - avec recours près d'une commission nationale - préalablement à la délivrance d'un permis de construire. Initialement, les comités départementaux d'urbanisme commercial (CDUC) et la commission nationale d'urbanisme commercial (CNUC) ont été créés en 1969. Ils limitaient l’implantation de commerces de plus de 3000m2 au moyen d’une procédure d'évaluation préalable à la délivrance des permis de construire. La loi "orientation du commerce et de l'artisanat" du 27 décembre 1973, dite "loi Royer", a renforcé ce dispositif en le rendant obligatoire pour les surfaces commerciales supérieures à 1000m2 dans les communes de moins de 40000hab (1500m2 dans les communes de plus de 40000hab). Par la suite, la loi du 5 juillet 1996 relative au "développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat" , dite "loi Raffarin", renforce la loi Royer en abaissant le seuil de surface au dessus duquel une autorisation est nécessaire à 300 m2 et en rendant les autorisations plus difficiles dans la pratique (changement de composition des commissions, renommée pour l'occasion Commission départementale d'équipement commercial (CDEC), et Commission nationale d'équipement commercial(CNEC).

L'analyse des implications économiques et sociales de ces lois montre que leurs conséquences ont été néfastes sur le pouvoir d'achat - les barrières à l'entrée réduisent la concurrence et créent des monopoles locaux - et sur l'emploi - moins de surfaces de vente implique moins d'employés. La plupart des économistes recommandent aux élus politiques un changement de réglementation. C'est récemment le cas de la commission Attali.

En 2008, il y a six groupes de la grande distribution à dominante alimentaire en France: Carrefour, Leclerc, Casino, Auchan, Intermarché et système U - auquel appartient le supermarché superU de Fayence. Ces 6 groupes représentent près de 80% du commerce de la grande distribution alimentaire. Le tableau ci-contre montre les 6 distributeurs classés par chiffre d'affaires sur la période 2000-2007; on voit que Carrefour arrive très largement en tête avec 92.2 milliards€ en 2007; système U est le plus petit des six avec 16.8 milliards€. Hormis Carrefour, ces groupes sont tous représentés en pays de Fayence: 1 hypermarché Leclerc à Montauroux, 1 supermarché Intermarché à Tourrettes, 1 supermarché système U à Fayence, 3 superettes Casino à Montauroux, Callian et Fayence.

En outre des magasins dits hard discount - originaires d'Allemagne - de surface plus petite 500-700m2 se sont installés, l'un à Callian (LIDL), un autre à Montauroux (ALDI). En modifiant le seuil soumis à autorisation d'implantation par les CDUC, à 300m2, au lieu de 1000m2, la loi Raffarin de 1996 avait pour but de limiter le nombre de ces surfaces. Ce faisant, cette loi protégeait plus les grandes surfaces déjà installées que le petit commerce local; en effet les LIDL et ALDI font plus concurrence aux grandes surfaces qu'au petit commerce, avec des prix en moyenne 15-20% moins chers ce qui profite aux revenus les plus modestes.

Les lois Royer, Sapin et Raffarin étaient destinées à limiter l'implantation des grandes surfaces commerciales et protéger le petit commerce. Elles soumettaient ces implantations à autorisation d'une "Commission départementale d'urbanisme commercial (CDUC)" les implantations de surface supérieures à 1000m2 dans les communes de moins de 40000hab, (1500m2 dans les communes de plus de 40000hab). Les CDUC se composaient de 9 élus locaux (meilleures défenseurs présumés du petit commerce local), 9 représentants des activités commerciales et artisanales et 2 des consommateurs; les critères d'appréciation étaient seulement économiques et commerciaux. Voir ici l'historique du dispositif de régulation des implantations commerciales.

La loi de modernisation de l'économie LME votée le 4 août 2008 doit permettre d’accroître le pouvoir d'achat des ménages en libérant la négociabilité des prix entre fournisseurs et distributeurs ; elle renforce la concurrence dans le secteur du commerce de détail en libérant les créations de magasins sous le seuil de 1000m2, c’est-à-dire pour les petits supermarchés.

Le transfert du super marché U de Fayence implique d'augmenter la surface de 1100m2 à 2200m2; c'est une implantation nouvelle qui relève de la loi du 4 août 2008, voir ici; il est donc soumis à autorisation de la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) devenue commission départementale d'équipement commercial (CDEC). C'est dans ce nouveau cadre règlementaire que se situe le projet de nouveau super marché U de Fayence. Voir ici la délibération du conseil municipal de Fayence du 6 octobre 2008. Mais autre aspect majeur du projet, c'est que le lieu choisi pour cette nouvelle implantation de grande surface commerciale est un terrain agricole, ce qui nécessite de modifier le plan d'occupation des sols. L'implantation nouvelle de SuperU nécessite donc d'abord en première phase, une modification du plan d'occupation des sols par une révision simplifiée, pour changer la destination du terrain agricole en commercial. Cette phase est en cours; l'enquête d'utilité publique aura lieu en octobre 2009. Si la révision simplifiée du POS est acceptée, le transfert et la nouvelle implantation de SuperU nécessitera ensuite, préalablement à la délivrance d'un permis de construire, une demande d'autorisation à la CDAC.

Tout projet de création ou d'extension de magasins doit être soumis, préalablement à la délivrance du permis de construire, à la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) compétente avec possibilité de recours auprès de la commission nationale d'équipement commercial (CNEC).

La commission départementale d’aménagement commercial est composée de huit membres; elle se réunit sous la présidence du préfet qui ne prend pas par au vote. Les critères d'appréciation sont les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont :

  • en matière d’aménagement du territoire :
    • l’animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ;
    • les flux de transport ;
    • les effets sur les Opérations Programmées
    • d’Amélioration de l’Habitat et les ZAC.
  • en matière de développement durable :
    • la qualité environnementale du projet ;
    • son insertion dans les réseaux de transports collectifs.

Une dérogation à cette demande d'autorisation est prévue pour les petites communes de moins de 20000hab. Mais cette dérogation concerne les surfaces commerciales comprise entre 300 et 1000m2. "Le régime dérogatoire: Dans les communes de moins de 20 000 habitants, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme peut, lorsqu'il est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, proposer au conseil municipal ou à l'organe délibérant de cet établissement de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet."


Mis en ligne le 23/07/2009 par Pierre Ratcliffe. Contact: Portail: http://pratclif.com