Mélanchon - Lepen deux faces du vote protestataire

Aux deux extrêmes de l'échiquier politique, Mélanchon et Lepen. 13.5% et 16% selon le dernier sondage du JDD, soit 30% des intentions de vote. Deux segments de la population française mécontents. Mais deux populations très différentes; d'un côté, une majorité de fonctionnaires, de l'autre une majorité d'ouvriers.

Le phénomène Mélanchon

Le tribun Mélanchon surfe sur tous les mécontements de cette partie de l'opinion qui reste révolutionnaire - l'extrême gauche; il a ainsi réussi à rassembler communistes, LCR, NPA, ATTAC, derrière la bannière du front de gauche soit environ 15% des intentions de vote. Le discours et le ton se sont radicalisés.

Les principales propositions du Front de gauche

Rétablissement des 35 heures,

Droit à la retraite à 60 ans à taux plein,

Smic à 1 700 euros brut par mois pour 35 heures,

Instauration d’un salaire maximum pour toutes les entreprises,

Augmentation immédiate des bourses d’études,

Élargissement des droits sociaux aux jeunes majeurs,

Convocation d’assemblées régionales et nationale pour l’emploi, les qualifications et les salaires, Remboursement à 100 % des dépenses de santé.

Blocage des loyers.

Revenu maximum fixé à 360000 euros par an.

Arrêt de la RGPP.

Abrogation de la réforme hospitalière.

Réintroduction des élections paritaires dans les caisses de gestion de la Sécurité sociale.

Mesures immédiates contre la précarité et titularisation des 800000 précaires de la fonction publique. Création d’un pôle public financier, appuyé sur la Caisse des dépôts et consignations, pour financer le logement social.

Création d’un pôle public de la construction pour casser le monopole des majors du BTP et permettre l’abaissement des loyers et des charges.

Création une agence nationale foncière et décentralisée au niveau des régions, dotée de fonds d’intervention importants.

Création d'un pôle public du médicament avec au moins une entreprise publique qui interviendra sur la recherche, la production et la distribution des médicaments.

Les directions des entreprises publiques qui se sont acharnées à introduire la logique privée au détriment de l’intérêt général seront remplacées par des cadres compétents et attachés au service public.

Le monopole public sera rétabli là où l’intérêt général le commande.

Front National "Les logiques du « retour électoral » selon Pascal Perrineau

L’amplitude du mouvement de « retour électoral » du Front national est évidente lorsqu’on réinscrit la performance électorale des élections cantonales de mars 2011 dans la longue période. Dans l’ensemble des cantons renouvelables, le Front national a atteint 15,1% des suffrages soit un niveau jamais atteint dans la chaîne des élections cantonales auxquelles il participe depuis bientôt près de trente ans. Il atteint presque la barre des 20% dans les seuls cantons où il était présent et témoigne d’une forte capacité de progression d’un tour à l’autre puisqu’il connaît une poussée de plus de dix points en moyenne dans les cantons où il était encore en lice au second tour. Neuf ans après le « choc de 2002 », le Front national a retrouvé une dynamique électorale certaine, très sensible dans sa capacité à reprendre pied dans les zones de force qui sont les siennes depuis plus de vingt-cinq ans. La reconquête électorale est particulièrement vigoureuse sur toute la façade méditerranéenne, le long du sillon rhodanien, dans la grande périphérie parisienne, dans l’Est et dans le Nord. On retrouve ainsi tous les bastions de cette France lepéniste à l’est d’une ligne Le Havre-Perpignan que l’on connaît bien depuis près de trente ans. Cette France des grandes conurbations, des inquiétudes urbaines et péri-urbaines, des terres de la désindustrialisation et du cosmopolitisme, redonne à la fille des espaces qu’elle avait donnés dans le passé au père. Le trio de départements dans lequel la dynamique du Front national est la plus forte, est constitué de la Moselle, du Gard et du Pas-de-Calais. Ce sont toutes trois des terres de la crise industrielle, de la pauvreté et de la poussée du chômage. Le « retour » du Front national est à l’œuvre sur le terrain d’un France industrielle qui s’est défaite sous les coups de boutoir de la globalisation. En revanche, les terres plus paisibles et rurales du centre et de l’ouest du territoire sont assez largement épargnées.

Cette capacité du Front national à être l’exutoire d’un malaise français devant la globalisation a resurgi dans le contexte d’une France inquiète et déboussolée. 84% des personnes interrogées par l’institut IPSOS en mars 2011 sont pessimistes quant « à l’évolution de la situation économique et sociale de la France au cours des prochains mois ». De tous les électorats c’est celui du Front national qui a le plus utilisé son vote pour exprimer ce malaise : alors que 47% des électeurs interrogés par IPSOS disent que « ce qu’ils pensent de la situation politique et économique au plan national est déterminant dans leur choix de vote », ils sont 70% parmi les électeurs du Front national. Cette position du Front national, comme symptôme d’une France qui va mal, a été renforcée par la volonté d’une partie des électeurs de la droite classique d’utiliser le vote frontiste pour dire leur mauvaise humeur. En effet, si une forte majorité d ‘électeurs proches de l’UMP est en désaccord avec les idées du Front national (61% selon un sondage de la SOFRES réalisé les 9 et 10 mars 2011), une minorité significative de 36% dit « être assez ou tout à fait d’accord ». C ‘est dans cette frange de l’électorat que le vote en faveur du Front national a pu servir de coup de semonce. Au second tour des élections cantonales, le Front national a d’ailleurs connu une vive progression là où il était opposé à la gauche (+10,1%) mais aussi là où il affrontait la droite classique (+11%). La dynamique électorale du Front national ne vient donc pas de la seule droite. La question de l’extrême droite n’est pas seulement une question politique posée à la droite, elle est également une question sociale posée à la gauche. La capacité de cette famille politique à s’enraciner électoralement dans des milieux populaires qui, pendant longtemps, se tournaient de manière privilégiée vers les forces de gauche, est un défi majeur lancé à celles-ci.


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Mis en ligne le 19/04/2012